"L'enfant aux cheveux bleus" en librairie !


Ca y est ! Ma pièce primée est officiellement parue aux Editions Les Cygnes, et vous pouvez dès à présent la commander sur leur site, ou en librairie. Heureuse de vous annoncer une si belle nouvelle 💙 Voici le synopsis et deux extraits ci-dessous :

Dans un village, un garçon de sept ans disparaît mystérieusement pendant quelques mois, puis est retrouvé, et revient à l’école. Ses cheveux sont devenus bleus, et il n’a plus aucun souvenir. Son vocabulaire aussi s’est modifié : son camarade Noah devient « Pullépinard », un livre un « zoizeauplat »… Les autres enfants, fascinés par sa transformation, essaient de l’aider à retrouver la mémoire. Dans l’espace de l’école et le temps d’une journée, ils vont réinventer avec lui le secret de sa disparition. Cette pièce, en jouant avec la langue, convoque l’amitié, et le formidable pouvoir de résilience de l’imaginaire.


L'ENFANT AUX CHEVEUX BLEUS


Matin. Une cour de récréation. Au loin, on aperçoit une dense, immense forêt.

 

Les enfants

 T’as entendu ça ?

Quoi ?

Ho, tu sais pas ?

Quoi ?

Ta mère te l’a pas dit ?

Dit quoi ?

C’est écrit là ! Tu sais pas lire ?

Oh ça va ! Toi-même !

Puisque c’est comme ça tu sauras pas !

Moi je sais déjà !

Mais quoi ?

Je te le dirai pas nanana !

Eh oh les CP ! Z’arrêtez de faire les bébés !

Ils l’ont retrouvé !

Qui ?

Celui qu’a disparu…

Quand ?

J’sais pas, y a longtemps…

Pas si longtemps que ça !

Il s’appelle… J’sais plus comment.

C’est marqué là ! Clément.

Ah oui, Clément ! Clément… J’sais plus comment.

Ah oui, lui !

Une fois je lui ai donné une Tête brûlée… il a pas dit merci.

Toi non plus tu dis pas merci !

Aïe me tire pas la couette !

Dis mer-ci !

Merci de quoi ?

De rien dis-le !

Hé ho les bébés ! Z’arrêtez ça maintenant !

Il a les yeux… marron je crois.

Les cheveux blonds.

Tout petit, comme ça.

Si petit ?

Il a disparu un jour, sa sœur l’a cherché, ses parents l’ont cherché, les gendarmes l’ont cherché…

Son chien pleurait tout le temps. Je le sais, j’habite à côté.

Le FBI l’a cherché…

C’est vrai ?

Tous les journalistes de toute la terre en ont parlé.

Non, là c’est pas vrai.

Et puis un jour, ils ont plus cherché. Mon père et ma mère disaient « c’est tellement triste », comme si c’était leur fils. Ma mère pleurait. Et le chien qui hurlait.

Comment il s’appelle ?

Clément je t’ai dit.

Le chien, comment il s’appelle le chien ?

Ura… quelque chose, un nom de planète, il aime bien l’espace Clément.

Il pleure toujours le chien ?

Non, il a plus voulu manger, même de la viande. Alors ils l’ont emmené au vert.

C’est quoi le vert ?

Au milieu de la campagne, espèce de bébé, là où y a pas de maisons.

Pas de maisons du tout ?

Si une seule, une grande ferme.

Et Clément, il revient quand ?

Ce matin. Il paraît…

Quoi ?

Qu’un truc bizarre lui est arrivé, mais je sais pas ce que c’est.

Le voilà !

Il a un bonnet.

Bah quoi ?

Il fait chaud, niquedouille !

Peut-être qu’il a plus de cheveux ?

Il était en prison, ils lui ont tout rasé !

Mais t’arrêtes, on va pas en prison à sept ans !

La maîtresse !

Ils se rassemblent. Elle va les faire rentrer.

J’y vais !

Moi aussi.

Ils l’ont mis dans la classe de CE1 ?

Bah oui c’est son groupe, il les connaît déjà.

C’est pour qu’il ait pas peur. Parce que imagine qu’il ait été enlevé, et enfermé dans une cave, et…

Et quoi ?

Il serait trau-ma-ti-sé.

On sait pas, on peut pas dire.

N’empêche, faudra attendre la récré, pour voir s’il a encore son bonnet.

 

 (...)

 

Dans la salle de classe. Tous chuchotent.

 

Ambre (un cheveu sur la langue)

Quand on est entrés

A pas de loup

Aux aguets comme le renard rapide

Constance m’a pincée

« Pince-toi je rêve » elle a dit

J’ai même pas crié

Non j’ai pris sa main fort fort

Et on l’a regardé

Avec nos bouches qui faisaient des « o »

 

Constance

Dans la classe y avait une petite brise

Comme au bord de la mer

Les yeux bruissaient comme des vagues

Puis des murmures de vent frais se sont levés

La maîtresse a dit chut

Et le vent est tombé

Les vagues se sont retirées en faisant des pointes

Y avait plus que lui au milieu qui regardait ses bottes de pluie

Avec les pieds de travers comme ça

Et ses cheveux tout fous légers devant ses yeux

Comme un morceau de ciel arraché aux nuages

Ses cheveux

Bleus

 

Anatole

C’était pas le bleu des perruques de Halloween

C’était pas les cheveux bleus de ma cousine Arminthe qui fait la maline

C’était…

Ca bougeait tout seul tellement c’était léger

Un truc super fin comme de la soie comme des poils de chaton des cheveux de bébé

 

Nassim

Y en avait plein

Ils allaient presque jusqu’à sa bouche

Il soufflait dessus pour les faire envoler

 

Noah

C’était pas un seul bleu, non

Il y avait

Il y avait tous les bleus de la terre

Surtout les clairs

Mais y avait aussi du foncé quand il les bougeait

Des ombres

 

Elvire

Il était transformé

Je suis ins-tan-ta-né-ment tombée amoureuse

On aurait dit un personnage des mangas de ma sœur

Un prince divin en bottes de pluie

Le prince Bleu

Le magicien des eaux

A sa main il tenait une branche toute verte de mousse

La maîtresse a dit : « Tu peux t’asseoir ici Clément, à côté d’Ambre »

Elle lui même pas demandé de poser la branche

« C’est parce qu’il revient de loin » dirait la voisine Amanda

Mais moi je crois pas la voisine Amanda

Je crois que Bleu a des pouvoirs magiques

Et que la maîtresse le sait

Elle sait tout c’est son métier


PRIX JEUNESSE 2022 DES ECRIVAINES ET ECRIVAINS ASSOCIES DU THEATRE (EAT)